L’oreille absolue est un phénomène qui fascine et intrigue, provoque et appelle ; un don, un fardeau, une capacité prodigieuse, une chose inutile… On trouve toutes sortes d’opinions à propos de l’oreille absolue.
Pour la plupart, les gens disent que l’oreille absolue est une capacité de nommer les notes musicales sans référence externe.
Pourtant, il s’agit d’un phénomène beaucoup plus complexe.
La capacité de nommer les notes sans référence n’est que le sommeil d’iceberg le reste étant tout un système d’organisation cérébrale par rapport à la perception auditive de l’individu.
Cela se reflète dans les habitudes des absolutistes qui se diffèrent des autres. Ses habitudes montrent que l’oreille absolue s’entraine constamment, et pas forcement dans une salle de répétition.
En faisant ma recherche, j’ai découvert que l’oreille absolue agit autrement dans les situations que tout le monde connait.
Curieusement, vous pouvez vous reconnaitre dans certains cas, dans d’autres, peut-être pas. C’est parce que nous avons tous l’oreille absolue intuitive, mais pour la plupart nous ne l’utilisons guère :
1. L’attention auditive de l’oreille absolue est naturellement prédominante par rapport aux autres types de perception.
Par exemple, si un absolutiste vous raconte son expérience lors la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympique, il vous parlera plus des hurlements de la foule, de la musique et des effets sonores que des couleurs, des danses ou des costumes portés par les athlètes.
2. Souvent l’oreille absolue reconnait les notes musicales dans les bruits quotidiens et connait parfaitement les notes chez soi.
Alors que l’on remarque que la brosse à dent électrique est déchargée quand elle ne marche plus, l’oreille absolue sait que la brosse doit «chanter» sur le Do ; si la note est baissée au Si, c’est le temps de la recharge.
3. L’oreille absolue remarque les sons autours d’elle et se rend automatiquement compte de leurs provenance. Souvent, elle peut en donner assez précisément la direction et la distance.
Même si l’absolutiste n’a pas vu son voisin partir, il a sûrement remarqué que vingt minutes auparavant, la porte de son garage a claqué et que sa voiture s’est éloignée de la maison. Témoin d’un accident, il dira bien exactement ce que se passait, à l’oreille, même s’il n’a rien vu.
4. L’oreille absolue se souvient facilement des musiques dès la première écoute.
Comme le décrivait Thomas D., «Depuis mon enfance, je peux rejouer les mélodies de la musique après avoir vu un film au cinéma. Dans la famille, ils m’appelait Petit Mozart, pour ça».
5. Entend le monde comme un grand orchestre.
Pour elle, il y a plus des notes que de bruits dans le monde. Olivier Messiaen n’avais pas besoin de composer laborieusement ses chansons des oiseux : il écoutait attentivement les forêts, retraçait ses chants et trouvait les sonorité musicales pour les reproduire.
6. Le musicien absolutiste ne pratique son instrument qu’un tiers de son temps.
Le reste se passe dans sa tête. Glenn Gould disait qu’il n’approchait même pas son piano avant de connaitre le morceau par coeur.
7. On peut tous décrire la différence entre les voix humaines. Les musiciens décrivent facilement celles entre les timbres des instruments. Mais c’est bel et bien l’oreille absolue qui sait décrire la différence entre les notes musicales, puisque chaque note possède sa propre identité, son propre visage, sa propre individualité.
Dans le poème Voyelles, Arthur Rimbaud, dont l’oreille poétique était sans doute absolue, associe chaque voyelle à une couleur («A noir, E blanc, I rouge, …»).
De même manière, un absolutiste peut normalement dire qu’une note est bleu, une deuxième est chaude, une troisième, du velours, ou encore une autre, joyeuse et brillante.
8. Tandis que la conception de consonance et de dissonance est à la base du solfège «non-absolue», pour l’oreille absolue cela n’est qu’une convention de la musique tonale.
Une seconde mineure sonne parfaitement reposée pour elle, tandis que triton est un intervalle de beauté supérieure. C’est pour cela que les musiques contemporaines sont très difficiles pour les chanteurs non-absolutistes. Pas seulement qu’elle «est impossible à mémoriser», mais «Où est l’harmonie ?».
9. Imaginez qu’un proche vous téléphone. Vous échangez avec lui quelques remarques insignifiantes mais malgré ses assurances que tout va bien, vous entendez qu’il est troublé. Qu’ entend-on ?
Le contenu de la conversation est tout à fait ordinaire, le timbre de sa voix ne change pas, on ne voit pas la mine de l’interlocuteur…
Le fait est que la tonalité de la voix (la note sur laquelle la voix se repose) est susceptible de baisser ou d’augmenter en fonction de notre état émotionnel.
Votre oreille absolue intuitive entend la différence et le cerveau la traduit en observation : la personne de l’autre côté est stressée, inquiète ou triste. Vous lui direz alors : «Attend, mais qu’est ce qui se passe ?»
Un absolutiste pourrait quant à lui préciser: «Ta voix est baissée d’une seconde majeure…». Pourtant, si ce dernier possède un tant soit peu de tact, il s’abstiendra de faire une telle remarque et agira comme tout le monde.
10. Une seule statistique fiable sur l’oreille absolue montre que les absolutistes se trompent jusqu’à 20 % du temps dans la reconnaissance des notes isolées.
Une note sur cinq peut donc facilement être erronée et aucun absolutiste honnête ne vous dira qu’il sait toujours et sans faute quelle est la note jouée, hors contexte.
Mais, contrairement aux non-absolutistes, il ne doutera jamais son oreille. Il l’utilisera en toute confiance, en acceptant ses fautes. Accepter d’être imparfait crée notamment un espace nécessaire pour l’audition, afin de s’entrainer sans exigence et de garder sa curiosité envers le monde des sons.
Si vous voulez découvrir votre oreille absolue et la faire s’épanouir dans votre votre vie (musicale ou pas) pour la rendre plus consciente, captivante et simplement plus facile, venez nous joindre !
Musicalement,
Katja Keller